Elpy, la poésie 2.0 pour tout l'monde

J’ai grandi dans des cuisines

de toute taille sombre ou claire

mais pas sabre au clair

dans Honfleur une baie vitrée

à l’ancienne toute croisée

surplombait la Claire

que me montrait mon grand père

aux oiseaux la margarine !

la cuisine c’est la chaleur

l’espace où s’enfuient les heures

une espèce d’intimité

qui invite à parler

Honfleur toujours, face hôpital,

en longueur tout étroite

on aurait dit une boîte

dans celle-ci le saint Graal

était un antique grille-pain

où on se cramait les mains

la cuisine c’est coffre à secrets

confidences à tout jamais

parsemées devant l’pot au feu

loin des yeux dans les yeux

à part ceux du bouillon

Longue vue sur les marécages

bien plus tard sur le pont

d’Normandie

qu’était pas encore construit

du formica c’était l’âge

plein soleil chez ma grand-mère

et chaleur de chaudière

à La Rivière

« tu sais, quand j’avais ton âge… »

sans morale ni prétention

c’est le début d’un partage

la séquence émotions

Retour Honfleur, rue brûlée

au pays du bois charbon

on se lavait à l’évier

s’éclairait au néon

et ouaouas dans la cave

dans les cuisines, les recettes,

ça vient en plus du reste

un peu comme un entremets

qu’à voix basse on préparerait

À Neuchâtel, c’est pas pareil

c’était un arrêt en plein vol

au vent

- avec ou sans air France -

au pays des merveilles

la cuisine était une personne

René, le cœur parfois c’est pas de bol

de temps en temps un « tu goûtes ? »

comme pour troquer l’émotion

contre une bonne respiration

remplie d’amour sans aucun doute

Wissembourg en avait deux

une pour l’hiver, une aux jours bleus

la cuisine brute de la vie

c’est Huguette qui me l’apprit

faites le plein d’hier

de vapeurs et odeurs

de touchers et chaleurs

ça fait du bien

été comme hiver

aujourd’hui comme pour demain

Avec elle

c’est pas pareil

j’ai qu’des plans q

Que boit-elle ?

quel âge a son chien ?

quelle race est la sienne ?

quelle formation a-t-elle ?

quelle origine a-t-elle ?

quel job a-t-elle ?

Quelle est sa vie ?

que mange-t-elle ?

qui lit-elle ?

qui écoute-t-elle ?

quels goûts a-t-elle ?

qu’achète-t-elle ?

quelles routes prend-elle ?

quelle plage aime-t-elle ?

quel(le)(s) ami(e)(s) a-t-elle ?

quelle famille a-t-elle ?

quelles odeurs aime-t-elle ?

quel logement a-t-elle ?

que pense-t-elle du catalogue quelle ?

Que rêve-t-elle la nuit ?

quelles passions vit-elle ?

qui voudrait-elle ?

quels parfums aime-t-elle ?

quel âge a-t-elle ?

quelle adresse a-t-elle ?

quel est son tel ?

qui es-tu ?

  copyright Elpy 2021 

(illustration par Franck Vidal, lien source : 

https://www.artmajeur.com/vidalfranck1/fr/artworks/13992653/plan-q-schema-des-zones-erogenes)

chez les pauvres il fait chaud

dès que tu es

accepté

comme tu es

si tu les as pas jugés

on peut s'parler

tu prends un café ?

un salut un sourire

un clin d'oeil un délire

on a rien mais

on rigole

même si on s'engueule

et fort même

comme quand on s'aime

d'amour vrai

 copyright Elpy 2022 

(illustration JC Tanguy, lien source : 

https://www.jc-tanguy.fr/news/39-newsletter-997-through-matter-l-art-comme-un-passe-muraille-la-peinture-a-l-huile-comme-une-fenetre-qui-s-ouvre )

C’était le temps

des fleurs pas chères !

on les cueillait

aux cimetières…

Chrysanthèmes

pour je t’aime

et attendrir

le cœur des femmes

droit comme menhir

vif comme la lame…

Faut pardonner

ces fleurs volées…

copyright Elpy 2020

 poème paru dans Vivre(s), tome 1, publié par Le Lys Bleu,

https://www.lysbleueditions.com/produit/vivres-tome-i/

(illustration Pascal Brachet, lien source : https://www.artmajeur.com/brachetpascal/fr/artworks/13459631/le-vieux-cimetiere)

Juste à côté de moi

la Seine coule

ma vie me tourneboule

dans l'bon sens

l'eau je la vois

en évidence

j'suis plus sa proie

comment j'ai pu vouloir en finir

dans le vide, dans l'eau, pire ?

 Faudra plus jamais laisser

des gens sans sensibilité

mettre en doute mes ressentis

ouf que ce temps est fini...

copyright Elpy 2022 

http://poeteauqueergay.canalblog.com/  

(illustration par Albert Lebourg, lien source : https://www.repro-tableaux.com/a/albert-lebourg/along-the-seine-at-meudon.html)

Dans la triste rue sans plaque

habitent des numéros moites

tous toutes ont le même nom qui claque

« Pasdepubdanscetteboîte »

-une grande famille de maintenant-

L’une sort son kin baissant la tête

pour jamais voir un vivant

l’autre tient un hôtel sans client

elle sourit à son chien, c’est la fête

l’troisième les zyeute par la fenêtre

elle sort plus depuis quinze ans :

vraiment,

les courses à domicile,

c’est exquis dans cette ville

En face, l’église est vide

même plus d’curé

c’est un musée

pour gras du bide

à chaque nouvelle rencontre

on s’en raconte

une belle d’histoire rêve éveillé démarre émerveillé

joli hasard nouvelle plastique

nouvelles mimiques nouvelles pratiques

nouveaux oui nouveaux nenni

à nouveau joui

tout nouveau tout beau même les occasions

celles qui font les larrons ceux qui disent tout est bon

dans l’cochon oh !

toute ma vie je me suis conté des histoires

mes dames surtout, mes grands moments d’espoir

Williams au sirop sucré de mes échappées

lyriques elles se voulaient si belles

irréels décibels

merci à vous charismatiques sans exception

pour nos débuts chaotiques remplis de passion

no regrets no comment sur la suite

les épisodes qui s’érodent impasse des truites

j’ai jamais suivi les modes boulevard du temps qui passe,

avenue d’où j’habite ruelle des mots qui cassent,

 sentier du rocher qui s’effrite escalier des peurs qui lassent,

dans l’auto, à l’hôtel on a vécu comme des fous

chez lui, chez elle chez toi chez moi chez nous

plus ou moins longtemps et moi - c’est désolant mâtin

cette immaturité au jasmin -

c’est la seule folie des instants que j’ai appréciée

merci pour ça d’un soir, d’un mois, d’un an,

d’un quinquennat, et plus mais une seule fois

- faut pas abuser des friandises - merci à toutes

merci et pardon même

quand j’vous ai fait d’la peine

j’me connaissais pas encore circonstance atténuante

n’évite pas, je l’subodore vous oubliez l’amante

c’était vous entre mes bras  en c’ temps là… c’est dommage

ces souvenirs jaunis sous l’orage

dedans j’les ai pas oubliés malgré moi malgré toi vous

malgré nous et malgré tout

copyright Elpy 2021  

(illustration par Monique Cros, lien source : https://www.expositionpeinture.com/peinture/rencontre-amoureuse-5613.html)

Elle va nue dans son appart’ comme si ces temps déshabillés

l’autorisaient à respirer

librement rien qu’en animal

sans vêtement dit normal

après sa douche elle se sèche la peau au vent

frais du printemps

fenêtre ouverte

sur l’inconnu qui quotidiennement

la mate la belette

Elle n’empêche rien et se demande

osera-t-il un jour

lui dire bonjour

je vous vois parfois madame

vous contemple

en reste bouche bée cousue

j’avais jamais vu de ma vie d’homme

un tel naturel dans la démarche les mouvements

les volumes d’un corps de femme

Ombre et lumière j’en tremble

à vous accueillir une baignoire attend at home

impatiemment et sans serviette

mes couleurs s’assortiraient à vos grains

de folie de peau de raisin

voici la clef, quand vous voudrez…

est-ce qu’il osera ?

avant qu’elle prenne froid…

 copyright Elpy 2020

(illustration Elodie Giraud lien source : https://www.artmajeur.com/elodiegc/fr/artworks/10622080/femme-sortant-de-la-douche)

 faire rire

avec des riens

faire du bien

aux âmes en peine

qui n’osent point

même sourire

ça les gêne

d’être là

à demi

sans elle, sans lui,

crépuscule

bouscule

love story

de leurs vies

copyright Elpy 2020  

poème paru dans Vivre(s), tome 1, publié par Le Lys Bleu éditions

https://www.lysbleueditions.com/produit/vivres-tome-i/

(illustration par John Watson Nicol, lien source : https://fr.wahooart.com/@@/AS83TF-John-Watson-Nicol-Le-Veuf)

Le temps, il nettoie l'présent

une fois conjuguée au passé

l'ivraie est digérée

Le bon grain, y en a pas tant

sauf qu'avec le regain

ça donne de jolies moissons

Les souvenirs sont loin

Restent les passions

heureusement

Comme on a plus à courir

ça permet d'sourire

copyright Elpy 2022  

(illustration Félicien Rops, lien source : 

https://fr.wikiquote.org/wiki/Fichier:F%C3%A9licien_Rops_-_Les_Sataniques._Satan_semant_l%27ivraie.jpg )